Partitions

Un des obstacles majeurs à la connaissance de George Onslow réside dans la difficulté à laquelle l'interprète est confronté lorsqu'il souhaite se procurer une de ses partitions : pour ne s'en tenir qu'à la musique de chambre, cela fait plus d'un siècle qu'il est impossible de trouver une édition intégrale des quatuors et quintettes d'Onslow, en dépit du fait que ces œuvres furent très largement diffusées de son vivant. Car ce n'est pas le moindre paradoxe de ce catalogue essentiellement instrumental que d'être aisément consultable en bibliothèque (notamment à la B.N.F.), mais pour ainsi dire indisponible en édition moderne.


Couverture et première page du conducteur du Quintette opus 1 n°1 de George Onslow.
Édition du 19e siècle de Breitkopf & Härtel.
(Collection particulière).

La réintroduction de George Onslow dans le répertoire des concerts passe donc tout d'abord par la publication de ses œuvres - entreprise audacieuse et complexe si l'on en juge par le contexte qui préside de nos jours au marché de l'édition musicale.
À ce titre, l'initiative des Éditions du Mélophile est plus que louable : en entreprenant une édition complète et critique des 36 quatuors d'Onslow, cette maison d'édition, qui a également publié une biographie monumentale du compositeur, offre enfin la possibilité aux musiciens de redécouvrir ce répertoire dans toute sa richesse. C'est à Baudime Jam, un des rares connaisseurs actuels du répertoire chambriste onslowien, qu'a été confiée la réalisation de cette édition : nous reproduisons ci-dessous son introduction au premier volume qui est paru en septembre 2003.

"Les 36 quatuors à cordes de George Onslow ont fait, de son vivant, l’objet de nombreuses éditions, en France et surtout en Allemagne. Plusieurs d’entre elles comportent des “changements faits par l’auteur”, qui concernent souvent des détails d’écriture, mais également, parfois, la physionomie d’un mouvement entier. C’est le cas, par exemple, du Finale du premier quatuor de l’Opus 9 dont nous possédons deux versions extrêmement différentes, et que l’on pourra découvrir pour la toute première fois dans ce recueil.
Ce cas de figure éditorial est suffisamment rare pour être souligné : peu de compositeurs de l’époque ont eu, comme Onslow, les honneurs renouvelés de l’imprimerie - ce qui en dit assez sur la popularité de ses œuvres auprès des instrumentistes, notamment au pays de Beethoven.
Par ailleurs, ce souci constant de la part d’Onslow de réviser ses quatuors atteste du soin qu’il apportait à la diffusion éditoriale de ses œuvres : plusieurs des changements apportés dans les éditions successives portent la marque d’un conseil technique, preuve de l’intérêt qu’il portait aux problèmes purement instrumentaux des interprètes. D’autres constituent un complet remaniement du matériel thématique et harmonique, et témoignent de l’évolution de la pensée d’Onslow, en même temps que de son exceptionnelle créativité.
La présente édition se fonde sur la confrontation de quatre éditions d’époque : Breitkopf & Härtel de Leipzig (principale source), Steiner und Comp. de Vienne, et Pleyel, à Paris, de 1816 (première) et de 1830.
Ce recueil présente donc les trois quatuors de l’Opus 9 tels que leur auteur les a légués à la postérité, tout en permettant de se référer aux différentes versions de certains passages ou mouvements : le chercheur y puisera matière à analyser l’évolution du style d’Onslow; le mélomane ne manquera pas d’observer avec intérêt le cheminement et la transformation d’une pensée musicale; quant aux quartettistes, professionnels ou amateurs, ils auront la possibilité rarement offerte de choisir leur version.
Pour cette édition moderne de l’Opus 9 d’Onslow - la première depuis le 19e siècle - on a souhaité proposer un matériel débarrassé des nombreux défauts des documents anciens, et mis aux normes contemporaines, avec notamment :

- corrections des erreurs de notes, rythmes, etc.;
- numérotation par mesure;
- rationalisation des mesures de reprises (notamment des cases de 1ère et 2e fois);
- rétablissement des nuances et coups d’archet;
- ajout des altérations octaviées à l’intérieure d’une même mesure;
- ajout des altérations de rappel lorsque nécessaire;
- mise en page tenant compte des tournes.

Les indications de tempi sont du compositeur.
Les finales du premier et second quatuors sont proposés en deux versions, et un passage de l’Allegro risoluto de l’Opus 9/1 est indiqué en ossia. Les autres variantes, plus discrètes, ont fait l’objet d’un choix fondé sur notre propre pratique de ses œuvres en concert. À ce titre, nous remercions chaleureusement les membres du quatuor Prima Vista qui, depuis plusieurs années, prêtent leur précieux concours à la redécouverte vivante de l’œuvre de musique de chambre de George Onslow.
Nous espérons que cette édition du cent cinquantenaire contribuera efficacement à la réintroduction d’Onslow dans le répertoire chambriste dont il doit redevenir une figure centrale.
Baudime Jam
Directeur de publication"


© 2003 Les Éditions du Mélophile

Quant à la préface, elle a été confiée, comme il se doit, à Serge Collot :

"Après s’être attaché à Wilhelm-Friedemann Bach, le musicologue Carl de Nys a fait revivre George Onslow par des concerts dans son château de Valprivas, par des disques et des émissions de radio dès les années 1960.
Pour avoir fait tirer des microfilms à la Bibliothèque Nationale, j’ai eu le bonheur d’avoir entre mes mains (alors que c’était encore permis), les partitions autographes des quatuors et quintettes à cordes de George Onslow.
Nous avons découvert une musique vivante, magnifiquement écrite instrumentalement et, au détour de quelques modulations personnelles, un peu en retrait, certes, mais dans le courant de ses grands contemporains, Schumann, Mendelssohn, qui ont laissé des appréciations chaleureuses.
Les musiciens de chambre français doivent beaucoup à George Onslow car, par son immense production, très jouée à son époque, il a contribué à maintenir une tradition de musique instrumentale qui n’a cessé de se développer ensuite. Son amitié avec le violoniste Pierre Baillot, qui avait fondé, sans doute, le premier quatuor à cordes “professionnel” français, a permis une évolution qui ne s’est pas démentie (Quatuor Tilmant, Quatuor Capet, Quatuor Calvet, etc.).
Cette édition de la Musique de Chambre de George Onslow vient à point pour élargir le répertoire avec un chaînon non négligeable. C’est un très lourd travail car les sources sont parfois divergentes. Je fais entièrement confiance à Monsieur Baudime Jam pour mener à bien cette entreprise et je l’en remercie de tout cœur.
Serge Collot
(Quatuor Parrenin, Trio à Cordes français, Professeur au CNSM de Paris, etc.)"

 

Cette édition constitue le plus important projet éditorial en rapport avec la musique de George Onslow : nous suivrons chaque année son évolution jusqu'à son accomplissement. D'ici là, nous invitons les quartettistes à découvrir ce premier recueil où se trouvent notamment les très belles variations sur le "God save the King", et qui est actuellement disponible sur di-arezzo.

Si la musique de chambre constitue la partie la plus importante du catalogue onslowien, celui-ci n'en comporte pas moins quatre symphonies pour grand orchestre. Le musicologue allemand Bert Hagels a supervisé l'édition de deux d'entre elles qui ont été publiées chez Ries & Erler à Berlin : il s'agit de la première, Opus 41, et de la troisième, sans opus. Nous lui avons posé quelques questions.

Le site George Onslow : Dans quelles circonstances avez-vous découvert George Onslow ?

Bert Hagels: À travers la lecture de communiqués et de comptes-rendus de concerts parus dans la presse allemande du 19e siècle : l'Allgemeine musikalische Zeitung, le Neue Zeitschrift für Musik, etc.

Le site G. O. : De quelle façon avez-vous décidé de publier deux de ses symphonies ?

B. H. : Le label cpo m'a sollicité pour réaliser le conducteur et le matériel de ces œuvres. [Ces deux symphonies ont été récemment enregistrées par Johannes Goritzki à la tête de l'Orchestre Philharmonique de la Radio de Hanovre : le CD vient de paraître. Cf. Discographie N.D.L.R.]. Par ailleurs, je disposais déjà d'une version non corrigée de ces partitions qui faisaient partie des documents réunis pour ma thèse de doctorat.

Le site G. O. : Quelles ont été vos sources ?

B. H. : Faute de documents autographes, j'ai utilisé les éditions d'époque et un fac-similé édité récemment dans un recueil intitulé "The symphony 1720-1840" [publié par Boris Schwarz, New York & London, 1981].

Le site G. O. : Combien de fois ces symphonies ont -elles été exécutées depuis la parution de votre édition ?

B. H. : Jusqu'à ce jour, et d'après ce que j'en sais, il n'y a pas eu d'exécution publique depuis la sortie du CD.

Le site G. O. : Avez-vous d'autres projets ?

B. H. : Beaucoup ! notamment la publication des œuvres des contemporains d'Onslow, tels que Ries, Fesca, Wilms ou Eberl ; à plus long terme, c'est-à-dire à l'horizon 2005, j'envisage peut-être de faire paraître les trios d'Onslow.

Le site G. O. : Ce serait effectivement un beau projet que nous vous souhaitons de pouvoir réaliser. Comment définiriez-vous le style d'Onslow dans ses partitions symphoniques ?

B. H. : La comparaison avec ses contemporains le montre très différent dans son approche très minutieuse et personnelle de ce genre ; ce qu'il faut remarquer avant tout, c'est son indépendance à l'égard du modèle beethovenien. En France, Onslow est d'ailleurs considéré comme l'antithèse de Berlioz.

Le site G. O. : Estimez-vous qu'aujourd'hui nous avons une connaissance complète de la vie et de l'œuvre de George Onslow ?

B. H. : Grâce à la biographie de Baudime Jam, récemment parue, les lacunes qui existaient jusqu'à ce jour dans le domaine de la recherche sont désormais comblées ; néanmoins, le degré de notoriété et la fréquence des concerts qui lui sont consacrés sont encore loin de correspondre à l'importance d'Onslow et de son œuvre dans l'histoire de la musique.

Le site G. O. : C'est un avis que nous partageons et c'est la raison pour laquelle nous avions souhaité vous donner la parole car vous faites partie des quelques spécialistes passionnés qui se sont engagés pour la réhabilitation de ce beau répertoire qui, peu à peu, nous l'espérons, et grâce, notamment à vos partitions, reviendra un jour en faveur chez les interprètes et les mélomanes. Merci Bert Hagels et tous nos vœux de réussite pour vos projets éditoriaux. Nous invitons nos internautes à visiter vos pages web (musica oblita) afin de faire plus amples connaissance avec vos travaux.

 

***

ÉDITIONS MODERNES


C'est dans cette rubrique que nous évoquerons les œuvres de George Onslow qui ont eu les honneurs d'une édition moderne : cette tâche sera d'autant plus aisée que ces partitions sont hélas en nombre très limité.
Pour ce premier aperçu, nous avons retenu deux opus tardifs du compositeur et trois quatuors : le Quintette opus 76, qui est une transcription de sa quatrième symphonie, le superbe Quintette opus 78, et les Quatuors n°19, 22 et 30.


WW219 ©1999

Publié par les éditions Walter Wollenweber (Gräfelfing, Allemagne), ce matériel a été tiré à 500 exemplaires dans la série "Unbekannte Werke der Klassik und Romantik" : c'est dire si cette belle publication ne connaîtra qu'un rayonnement limité. La préface nous apprend que l'éditeur s'est fondé sur une seule source : l'édition Kistner de 1849. La qualité de ce recueil est excellente à tous points de vue : impression, lisibilité, mise en page, etc.
Cette œuvre a été récemment interprétée (avec cette édition) par Kornelia Ogorkowna (piano), Daniel Grimonprez (contrebasse), et les membres du quatuor Prima Vista pour un concert qui a eu lieu le 28 janvier 2004 à Clermont-Ferrand.

 


SJ Music n°Q1993-4 ©1993

Les éditions SJ Music (Cambridge, Royaume-Uni), ont inscrit un quatuor (opus 8 n°2), trois quintettes d'Onslow à leur catalogue : les opus 38 ("La balle"), 39 et 78. Les deux premiers sont pour deux violoncelles, tandis que le troisième est pour deux altos. Cette dernière est une très belle page chambriste qui devrait figurer plus souvent à l'affiche des concerts : Serge Collot et le quatuor Prima Vista l'ont interprétée lors d'un concert de leur saison en mars 2003, ainsi qu'au château de Valprivas en juin 2003.

On notera également que -chose rare - SJ Music a publié un conducteur pour l'opus 38 dont nous vous proposons un aperçu en regard d'une édition d'époque (Breitkopf & Härtel - collection particulière) :

 

Les Éditions Silvertrust ont publié trois quatuors d'Onslow : les opus 46 n°1 et 47 sont des réimpressions de l'édition Kistner dont les différentes erreurs ont été corrigées et les mesures numérotées pour une plus grande facilité d'utilisation. En revanche, l'opus 56 est une édition entièrement neuve réalisée par Skyler Silvertrust : outre les corrections d'usage, la partie de violoncelle a été récrite pour supprimer la clef de sol octaviée et la remplacer par une clef de fa ou d'ut selon le cas. Pour plus d'information, une interview exclusive de Ray Silvertrust peut être consultée sur ce site :


ES-2005-11

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